jeudi 6 janvier 2011

#2

(à Maurice Blanchot)

Il jouait dans la cour derrière la maison. Il vit une dinde suivie, dans un ordre militaire, par ses poussins. Le dernier poussin n’avait pas de plumes sur sa gorge. Il s’approcha de lui et le prît dans ses mains pour le caresser. La horde était là : son cousin, et ses deux cousines. L’une s’approche de lui et murmure : « Misère ! Tu as touché le poussin malade ! Tu vas mourir cette nuit ! »… Puis, avec une voix plus aigue et tranchante : « Un enfant avant toi avait touché ce poussin. Tu sais ce qui lui est arrivé ? Eh bien le soir ; à minuit, il a perdu sa chair. Elle tombait par terre alors qu’il criait de douleur jusqu’à ce que mort s’en est suivie…Et tu sais quoi ? Il va t’arriver la même chose ! » L’enfant, terrorisé, courut à la maison… Dans la cuisine, il trouva la grande cousine. « Celle-là ne peut pas me mentir ! » se dit-il. Alors il lui raconta ce qui est arrivé.
« Tu as touché le poussin sans plumes sur la gorge ! Malédiction ! Il a le cancer ! » Ce dernier mot sonnait dans sa tête comme un glas. Il attendit alors minuit en sanglots. Peut-être qu’il s’est endormi avant. Le lendemain, c’était déjà quelqu’un d’autre.

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